Philippe Martin

Professeur d’histoire moderne à l’Université Lyon 2, Philippe Martin est Directeur de l’ISERL (Institut Supérieur d’Etude des Religions et de la Laïcité). Membre de l’UMR 5190 (LARHRA), ses recherches portent sur l’époque moderne, la spiritualité, les dévotions, la Nouvelle-France, l’espace sacré et l’histoire du livre.

Rencontre avec Philippe Martin, directeur de l’ouvrage "Varryations, gens du livre, marronneurs et bibliothécaires" aux Presses de l’Enssib

À l’occasion de la parution aux Presses de l’Enssib (collection Papiers) de "Varryations", gens du livre, marronneurs et bibliothécaires, nous avons rencontré Philippe Martin, directeur de cet ouvrage qui rend hommage à Dominique Varry, professeur de l’histoire du livre à l’Enssib.

 

1/ Figure internationale de l'histoire du livre francophone, Dominique Varry fait l'objet d'une publication que vous avez dirigée aux Presses de l'Enssib. Pourriez-vous nous décrire cette personnalité hors du commun ?
Dominique Varry a trois facettes. C’est d’abord un enseignant qui a formé nombre des conservateurs et responsables patrimoniaux actuels ; une longue carrière à l’Enssib où il s’est spécialisé en bibliographie matérielle. C’est aussi un chercheur qui s’est penché sur l’histoire des bibliothèques, sur les hommes du livre et sur les circuits parallèles du livre (en particulier les faux). Enfin, c’est un passionné : amoureux de l’Angleterre et de son Pays de Belfort.

 

2/ L’ouvrage rassemble treize textes de Dominique Varry. En tant que directeur de la publication, vous avez retenu certains textes plutôt que d'autres. Sur quels critères s'est fait votre choix ?
Le premier critère a été chronologique. Le XVIIIe siècle est la période de prédilection de la recherche de Dominique Varry. Nous avons ensuite décliné les principaux champs de recherche dans lesquels il s’est illustré : les hommes du livre ; les bibliothèques ; la contrefaçon.

 

3/ Quels sont pour vous les apports de Dominique Varry à la discipline de l'histoire du livre ?
Dominique Varry a apporté deux choses essentielles. Il a développé l’histoire des bibliothèques en dirigeant, par exemple, le tome 3 de L’histoire des bibliothèques françaises (Éditions du Cercle de la Librairie, 1991). Bon angliciste, il a compris l’importance des travaux anglo-saxons sur la bibliographie matérielle. Il a développé cette discipline en France, composant un manuel essentiel.

En 2008, il co-organise un colloque 50 ans d’histoire du livre (1958-2008) qui fait le point sur un demi-siècle d’historiographie1.

 

4/ D'après vous, comment s'explique que la ville de Lyon soit devenue une place centrale de l'histoire du livre ?
Le site de Lyon dispose de trois atouts. Une remarquable bibliothèque municipale aux collections d’une très grande richesse. Une tradition d’imprimerie très ancienne, depuis 1473, avec aujourd’hui un très beau musée de l’imprimerie. Enfin, les centres de recherche sont nombreux (ENS, universités…). L’Enssib joue un rôle central dans ce dispositif grâce à ses formations et au Centre Gabriel Naudé.

 

5/ Quelles sont les perspectives de l'histoire du livre ? En quoi cette discipline a-t-elle de l'avenir ?
L’histoire du livre est au croisement de l’histoire culturelle, histoire des techniques, histoire sociale, histoire industrielle… Elle a donc deux publics : les universitaires mais aussi les professionnels des bibliothèques ou du livre ancien. Elle permet de faire du livre un objet vivant, pas simplement un assemblage de pages.

 

6/ Pour conclure, pourriez-vous nous livrer quelque anecdote sur les travaux de Dominique Varry ?
Dominique Varry aime lire des romans policiers. Pour lui, la bibliographie matérielle lui permet de devenir un enquêteur du passé. Il se passionne pour les fausses éditions de Galilée (2012-2019), traque les fausses adresses. Il explique : « C’est toujours exaltant de découvrir et de révéler des choses que nos anciens, volontairement ou non, ont celées. »

 

1. NDLR : Ce colloque a d’ailleurs fait l’objet d’une publication aux Presses de l’Enssib, devenue un livre de référence

 

Propos recueillis par Véronique Branchut-Gendron
Le 3 septembre 2020